Valère Staraselski

1909-2009 Un siècle de Vie Ouvrière
"100 ans de la vie des ouvriers"
HD - 10 septembre 2009

100 ans de la vie des ouvriers

C’est « pour que le mouvement ouvrier et populaire vienne se ressourcer à sa propre histoire » que Valère Staraselski et Denis Cohen ont écrit « Un siècle de Vie ouvrière ». Ce livre original retrace, à travers 100 ans de publication de « la Vie ouvrière », l’histoire sociale, économique, politique et culturelle de la France, avec plus de 700 illustrations et photographies. Un témoignage essentiel.

Une revue paraît en 1909 pour « donner à l’ouvrier la science de son malheur ».
100 ans après, elle poursuit l’incessant combat pour l’émancipation et la dignité

« La Vie ouvrière », journal de la CGT, fête ses cent ans en octobre. A l’origine, une idée simple : « Nous voudrions que cette revue rendit des services aux militants au cours de leurs luttes, qu’elle leur fournisse des matériaux utilisables dans la bataille et dans la propagande et qu’ainsi l’action gagnât en intensité et en ampleur », expliquait son fondateur, Pierre Monatte.
Pari tenu ! De la petite revue bimensuelle qui paraît le 5 octobre 1909, dont l’objectif annoncé est de « donner à l’ouvrier la science de son malheur » à « La Nouvelle Vie ouvrière » de 2009, c’est un salutaire rappel d’un point de vue qui s’impose dans notre actualité : celui du combat multiforme et incessant pour l’émancipation économique et sociale. Pour la dignité aussi !
Que de choses dans ces pages ! En 1911, par exemple, Julien Symian, ministre radical des Postes et Télécommunications, hurle aux dames téléphonistes en grève, rue du Louvre à Paris : « Tas de putains, vous allez reprendre le travail ! ». En 1974, lors de la plus grande grève des postiers du pays, le ministre qui avait parlé du « travail idiot dans les centres de tri » sera remercié quelques temps après...
De 15 000 abonnés en mai 1936 à plus de 200 000 en 1937, « La Vie ouvrière » atteindra des records de diffusion à la Libération pour, les années suivantes, devancer « Paris Match ».

Durant la guerre, à côté des appels au sabotage, à la lutte armée et des slogans, tel « La vengeance est un devoir sacré », la « VO », devenue clandestine, n’oublie pas le ravitaillement. En 1946, les ministres ouvriers - tous syndicalistes de la CGT- sont chargés par le gouvernement De Gaulle de mettre en œuvre le programme du Conseil national de la Résistance qui leur doit l’essentiel.

Des événements de 68 durant lesquels « La Vie ouvrière » paraîtra régulièrement, en passant par l’espoir suscité par l’élection de François Mitterrand (« Rien n’est joué. Tout dépendra de l’intervention lucide, active, constante et responsable des travailleurs » écrit la « VO »), de la chute du mur de Berlin à la victoire planétaire destructrice des néolibéraux, de la lente descente aux enfers des salariés jusqu’au défilé unitaire du 1er mai 2009, « La Vie Ouvrière » prônera toujours l’initiative contre l’attentisme.

Dans une période où le socle des garanties collectives est attaqué pour être détruit, notre société, orpheline d’une certaine dynamique qu’elle a connue durant le Front populaire, la Libération, les trente glorieuses, ne peut pas faire l’économie d’organisations qui unissent le monde du travail dans sa diversité et pour cela de « coopérative intellectuelle », selon le mot de Monatte.
« Nous avons tendance les uns et les autres à faire davantage appel aux réflexes qu’à la réflexion, or nous vivons un tel bouleversement que les réflexes d’hier ne marchent plus et nous mettent sur la défensive », affirme Maryse Dumas. A travers cet ouvrage, nous avons voulu avec Denis Cohen que le mouvement ouvrier et populaire vienne se ressourcer à sa propre histoire, et témoigner de quoi il a été capable pour construire et reprendre toute sa place dans l’Histoire.

« Un siècle de Vie ouvrière, 1909-2009 », de Denis Cohen et Valère Staraselski. Préface de Bernard Thibault.
Publié aux éditions du cherche midi. 30 euros.