Valère Staraselski

Voyage à Assise - 2005

Voyage à Assise publié en 2005 aux éditions Bérénice

par Valère Staraselski
pour la revue en ligne Vendémiaire N°17
Mai 2005

" Parfois, certaines interminables journées d’hiver expriment parfaitement ce qu’est le découragement. Quelque chose dans la couleur du ciel lorsqu’il pleut ou qu’il grisaille. Le terreux de la terre. Un paysage décharné. Le vert esseulé d’une touffe d’herbe frémissant entre les cailloux. La hideur des villes devenues tout à coup vides quand s’étale partout la détresse des laissés pour compte. Les rapports entre humains aussi, ou plutôt l’absence de rapports. Par exemple, ces longs ou bien ces brefs mais denses silences gênés entre eux, pleins du vide de la non communication. Les horreurs du monde évidemment, montrées journaux télévisés après journaux télévisés, ont de quoi décourager le quidam. Le découragement. Le découragement qui se décline d’abattement en déception, de désappointement en accablement, d’écoeurement en anéantissement est donné une fois pour toute aux hommes. C’est pourquoi, l’être qui a un coeur et qui veut vivre, a inventé le courage, donnant à celui-là formes multiples. La religion n’est pas la moindre de ces formes. Perpétuel dépassement du découragement, ne le refusant pas parce que le comprenant, par la reconnaissance de l’autre, la religion m’est toujours apparue comme voulant porter plus loin les limites de l’humanité de l’Homme. Et cela, même si dans son histoire, il y a eu des Torquemada....
Je ne me souviens plus si dans son film Uccellacci e uccellini, Des oiseaux petits et gros, où l’on voit François d’Assise évangéliser les oiseaux, Pasolini a situé son action en hiver ou non ? Il me semble que oui... En tout cas, me voilà avec les images en noir et blanc du film qui repassent dans ma mémoire, le dénuement de la campagne que je crois revoir, et tout à coup, cette phrase du cinéaste : "Je suis happé par un tel bonheur que je deviens presque aveugle." Ce bonheur est plus que le bonheur, ce bonheur dont est saisi Pasolini s’appelle bien sûr la joie. "

 Extrait de Voyage à Assise, collection Alix, aux éditions Bérénice

Naissance de cet écrit

"Le 24 janvier 2002, le pape Jean Paul II convoquait pour la deuxième fois une assemblée de prières pour la paix dans le monde à Assise, en Italie.

Témoignage Chrétien avait alors demandé à l’écrivain Valère Staraselski, communiste et athée, d’accompagner un journaliste pour rapporter ses impressions de voyage.

Fortement impressionné par ce qu’il a vécu sur place, il écrivit beaucoup plus qu’un reportage. C’est l’intégralité de son texte qui est aujourd’hui publié aux éditions Bérénice sous le titre Voyage à Assise."

 Luc Chatel
Témoignage Chrétien

Critiques

Voilà presque quatre ans, le 24 janvier 2002, le pape Jean-Paul II convoquait pour la deuxième fois dans l’histoire de la chrétienté moderne une « assemblée de prières pour la paix » à Assise en Italie. Quatre mois après l’attentat contre le World Trade Center, plus de deux cents personnalités de confessions différentes et originaires de tous les continents répondaient à cette invitation. C’est le récit de cette rencontre exceptionnelle et qui fit l’objet d’un reportage publié par notre confrère Témoignage chrétien que nous livre ici, dans son intégralité, l’écrivain Valère Staraselski. Écrit par un « communiste, athée », comme il le rappelle lui-même, ce court texte témoigne d’une expérience humaine singulière et, au-delà, d’un enjeu symbolique et politique considérables pour une Église qui, hier encore, rappelle René Rémond en exergue, « condamnait comme une folie toute forme de « parlement des religions ». On ne résumera pas l’opuscule. Il faut le lire comme des pages d’histoire s’écrivant au présent, dans l’atmosphère de ferveur sacrée et de lucidité fraternelle d’une assistance pleinement convaincue que la paix ne tombe pas du ciel, qu’elle est le fruit du dialogue, d’un combat qui rassemble les hommes, les peuples, les cultures et les religions par-delà toutes les frontières. Des pages, qu’on pourra partager, nous dit encore l’auteur comme une « incitation à universaliser l’altérité ».
 L.D
pour l’Humanité