Valère Staraselski

La fête de l’Humanité, 80 ans de solidarité
Essai - 2010

Valère Staraselski à TV5

Interview Valère Staraselski TV5Monde

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Ces artistes qui assumaient de se rendre à la fête de l’Huma pendant la Guerre froide

La fête de l’Humanité est devenue partie intégrante du patrimoine national. Les anonymes, militants, artistes, personnalités politiques, chacun à sa manière, façonnent son originalité et en assurent le succès : Jacques Prévert, Charles Trenet, Jean Ferrat, Yves Saint Laurent, Picasso, Youri Gagarine, Johnny Hallyday, Jacques Brel, Juliette Gréco... Mais comment se déroulaient ces fêtes, à l’époque de l’URSS ? Extraits de « La fête de l’Humanité : 80 ans de solidarité » de Valère Staraselski publié aux éditions du cherche midi.

Selon Julien Clerc : « On ne peut ignorer la plus grande fête populaire française... »
Le 1er septembre 1983, le vol Korean Air Lines 007, vol régulier de la compagnie sud-coréenne Korean Air Lines, est abattu par un chasseur de l’Union soviétique à l’ouest de l’île de Sakhaline. L’avion de ligne transportait 269 passagers et membres d’équipage, dont le député démocrate conservateur américain Larry McDonald. Il n’y a aucun survivant.

L’affaire bouleverse le monde et en France, quelques jours après, se déroule la traditionnelle fête de l’Humanité. Les artistes s’y rendront-ils comme chaque année ?

Extraits de La fête de l’Humanité : 80 ans de solidarité de Valère Staraselski aux éditions du cherche midi.

Indigné, Le Quotidien de Paris du 9 septembre interroge les artistes qui se produisent sur la scène centrale et réunit leur réponse sous le titre : « Ils seront à la Fête de l’Humanité, ils aiment ça. » « Si un ami me conseillait de ne pas y aller, je lui répondrais aussitôt de me trouver une salle avec 200 000 personnes qui ne soient pas, elles, des pisse-froid, comme le public parisien », répond Sapho. Selon Julien Clerc : « On ne peut ignorer la plus grande fête populaire française... Que les hommes politiques fassent leur boulot et qu’on ne m’emmerde pas avec Reagan, le goulag et l’Afghanistan. » Et Francis Lalanne déclare quant à lui : « Si, sur le front de l’URSS, il y a une pancarte avec l’inscription “communistes-marxisme”, les partis communistes de France ou d’ailleurs n’ont peut-être pas les mêmes mots d’ordre. En attendant, à La Courneuve, je chanterai tout simplement devant des gens et non devant un parti. » Selon ce journal, la majorité du public réagit dans le même sens. 88% de ceux à qui l’on demande, cette année même, si « des désaccords politiques peuvent les faire hésiter à venir à la Fête »répondent par la négative.

Cette année 1983, Julien Clerc en duo avec Robert Charlebois, qui interrompt une de ses chansons pour rendre hommage aux victimes du Boeing coréen, Francis Lalanne,Maxime Le Forestier, Isabelle Aubret, Sapho, Mireille Rivat, Catherine Ribeiro sont sur la scène centrale. Au sujet du geste de Robert Charlebois, alors queLucien Marest écrit dans l’Humanité : « Il ne viendrait à l’esprit d’aucun communiste de contester à qui que ce soit, où que ce soit, le droit de s’exprimer librement », Ivan Levaï, dans sa revue de presse radiophonique, explique : « Robert Charlebois, invité vendredi dernier deMichel Drucker dans “Studio 1” avait prévenu qu’il ne laisserait pas passer sans rien faire la tragédie du Boeing abattu. Hier après-midi, à La Courneuve, Charlebois a tenu parole. Il a interrompu sa chanson Je veux de l’amour en ces termes : “Il me reste une minute à chanter". Je ne la chanterai pas. Je la dédie aux 269 absents de ce dimanche.” Témoignage du Matin de Paris : “Cette minute de silence a suscité plus d’applaudissements que de sifflets.” » Et il remarque que le journal « l’Humanité n’a rien escamoté. Il fallait que cela soit dit. C’est fait ». Par ailleurs, toujours sur la scène centrale, un hommage à Lorca est donné par le ballet hongrois de Györ. « 20 h 30, dimanche soir, le vent soufflant en rafales projette un mur de pluie sur la grande scène, écrit Philippe Meunier, de l’Humanité. À ses pieds, dans la nuit, des milliers de spectateurs luttent contre le froid, assis dans la boue. Côté coulisse, l’angoisse au ventre, les artistes du ballet de Györ se préparent pourtant à relever le défi du ciel. La bourrasque va se révéler comme le catalyseur de l’impossible. Les vingt et un danseurs et danseuses hongrois vont créer l’événement dans l’événement qu’est déjà à ce moment la Fête de l’Humanité. » « L’homme gravé » : sous ce titre, 200 gravures deDürer à Miró sont exposées, sous le chapiteau des expositions pendant que les manuscrits de Marx le sont au village du livre où l’on célèbre le centenaire de sa mort. Le stand du Comité central organise quant à lui une exposition sur les droits de l’homme, notamment dans les pays sous-développés et dans leur rapport aux évolutions techniques. Il s’agit là de l’un des trois thèmes sous lesquels se tient la Fête, « La paix » et « Produire français » constituent les deux autres. Le stand de l’Humanité est consacré à la paix. « Si tu veux la paix, prépare la paix et combats pour une paix juste et durable entre Libanais, Palestiniens et Israéliens », affiche-t-il. Quant au mot d’ordre « Produire français », il faudra deux décennies pour que, par-dessus les railleries et les accusations de nationalisme, voire de xénophobie, la réalité de ce qu’il représente s’opère dans les consciences, mais un peu tard pour le pays. Les communistes qui participent au gouvernement affirment que « croissance et justice doivent être les locomotives du train France ». C’est ainsi, par exemple, qu’à l’espace Midi, des ouvriers, des techniciens, des scientifiques effectuent des démonstrations sous les yeux du public : montage et démontage d’une boîte de vitesses, comment est faite la fusée Ariane...

Par ailleurs, en prélude au meeting, deux cortèges circulent dans la Fête, composés des militants de Talbot, de Renault deFlins, de laSKF d’Ivry, de Citroën-Aulnay et des Hauts-de-Seine, de Creusot-Loire, des mineurs et de travailleurs du Nord, des mineurs de Carmaux, des sidérurgies de Sacilor. Invité d’une radio, Roland Leroy déclare : « Nous sommes au gouvernement pas pour une raison de solidarité gouvernementale, nous sommes au gouvernement pour faire une certaine politique... celle qui a été choisie par la majorité des Français. » Cette année-là, qui voit Yves Mourousi avec l’équipe de TF1 revenir et l’accordéoniste Marcel Azzola faire un triomphe, une enquête conduite auprès de 2 373 personnes dont les résultats sont partiellement publiés par l’Humanité Dimanche a été réalisée par un institut de sondage (l’IFOP) à la demande de la direction de la Fête. Cette enquête fait apparaître très nettement qui vient à la Fête le plus souvent y revient...


Les articles de presse pour La fête de l’Humanité, 80 ans de solidarité

La fête de l’Humanité, 80 ans de solidarité Préface Patrick Le Hyaric, ISBN : 978-2-7491-1768-3

Valère Staraselski est l’auteur aux éditions de L’Harmattan de Il faut savoir désobéir,
Aragon, l’inclassable et de
Aragon, la liaison délibérée.

Valère Staraselski est l’auteur aux éditions du Cherche midi de La Fête de l’Humanité
Comme un air de liberté Préface : Patrick Le Hyaric
, Un siècle de vie ouvrière avec Denis Cohen, Un siècle d’Humanité 1904-2004, avec Roland Leroy.

Valère Staraselski est l’auteur aux éditions Bérénice : de Garder son âme,
Culture pour tous, haute définition, ouvrage collectif,
Au nom de la loi, cosigné avec Didier Daeninckx et aussi d’ Aragon, l’invention contre l’utopie.