La fête de l’Humanité, comme un air de liberté de Valère Staraselski
Pour la 80e édition de la Fête de l’Humanité, l’écrivain Valère Staraselskis’est plongé dans la longue histoire d’une fête née en 1930 pour défendre le journal de Jaurès. Au fil des pages de son livre, abondamment illustré, on remonte le temps de Fête en Fête, jusqu’aux premiers mois de 2015...
C’est un village éphémère qui s’installe chaque année au début de septembre. La première fois, ce fut en 1930. La Fête de l’Humanité célèbre sa 80ème édition à La Courneuve (Seine-Saint-Denis). Seules les années noires de la Seconde Guerre mondiale manquent à l’appel. Il est curieux de remarquer que lorsqu’elle naît, le7 septembre 1930, elle est engagée dans le combat pour la défense de l’Humanité. L’année d’avant, le 13 juin 1929, alors que la crise sévit et que monte l’idée de changement, le ministre de l’Intérieur de l’époque accuse les communistes de comploter contre la sûreté de l’État. Et les autorités déjà visent le tiroir-caisse alors qe le journal est en difficulté. Depuis sa naissance en 1904, le journal de Jaurès manque de fonds pour assurer son existence et son avenir mais il est toujours là. Le directeur de l’époque, Marcel Cachin, lance un appel auprès des lecteurs et des militants communistes :150 Comités de Défense de l’Humanité (CDH). La souscription s’organise. L’Humanité est sauvée et les CDH, réunis en congrès le 7 septembre 1930 àBezons, au nord de Paris, organisent une fête qui signe l’acte de naissance de la Fête de l’Humanité.
L’écrivain Valère Staraselski raconte dans "La Fête de l’Humanité, comme un air de liberté" (1) cette longue histoire, de Fête en Fête, avec une multitude de témoignages, d’anecdotes qui font de cet événement politique et festif, artistique et convivial, un monument inscrit dans le patrimoine national. Ce n’est pas la Fête qui fait la politique. Mais incontestablement la politique, tout au long de son histoire, est passée par la Fête de l’Humanité durant 80 Fêtes qui furent autant de rendez-vous de luttes, de joie, de fraternité, comme le souligne Patrick Le Hyaric, directeur de l’Humanité, pour qui "entrer dans la Fête de l’Humanité... c’ est entrer dans un lieu où soudain naît l’ envie de faire société ensemble, de faire monde commun. Un lieu où toutes et tous sont égaux". "Un lieu où l’on nargue le malheur et l’oppression, un lieu où on se rassemble", ajoute-t-il. Au long des pages, il y a les Fêtes que l’on n’a pas connues, celles que l’on a vécues. Il y a l’humoriste Fernand Raynaud, simple visiteur se promenant dans la Fête, qui, en 1956, reconnu, dut signer des autographes sur des mouchoirs, des vignettes ou des albums de Pif. Il y a aussi la Fête de 2001, quatre jours "après les attentats contre les tours du World Trade Center, à New York, placée sous le signe de la fraternité face au désordre du monde". Et puis celle de 1973, qui salue la libération d’Angela Davis... Petites et grandes histoires se croisent, les expos s’affichent, les concerts s’enchaînent, témoignant de l’ouverture qui anime le lieu, qu’il soit à Bezons, à Montreuil, sur la pelouse de Reuilly, dans le bois de Vincennes à Paris, ou au parc de La Courneuve où la Fête a pu prendre ses aises. Rien ne semble manquer dans l’ouvrage de Valère Staraselski... malgré les choix, forcément.
Un précieux moyen de défense pour le présent et pour l’avenir. L’ouvrage, abondamment illustré, témoignage de la richesse de la programmation artistique, de la diversité des luttes sociales et politiques. Et on apprend que la Fête de l’Humanité 1931 fut "sonorisée par haut-parleurs" pour permettre d’écouter Marcel Cachin remercier "les militants dévoués qui assurent la défense de l’Humanité" et inviter les "camarades (à) veille (r) avec un soin jaloux, en ces temps troubles sur l’Humanité, l’un de vos essentiels, l’un de vos plus précieux moyens de défense pour le présent et pour l’avenir". Les lectrices et les lecteurs d’aujourd’hui continuent de défendre leur journal, de verser à la souscription avec toujours le même esprit de liberté. Pour l’Humanité qu’ils ont en partage. •
CLAUDE BAUDRY
LA FÊTE DE L’HUMANITÉ Comme un air de liberté de Valère Staraselski
Préface de Patrick Le Hyaric
Format : 22,5 x 28 cm, 216 pages illustrées
le cherche midi éditeur. 23 euros.