Valère Staraselski

La revanche de Michel-Ange

Anne-Marie Koenig - Le Nouveau magazine littéraire - Les livres du mois - novembre 1999

Cinq nouvelles composent le recueil La Revanche de Michel-Ange de Valère Staraselski.

D’inégale longueur et assez hétéroclites au premier abord, elles présentent, par les descriptions minutieuses des menus faits et gestes des protagonistes, des reflets de la vie quotidienne, facette noire ou rose selon qu’il s’agit de la société ou des femmes. Instantanés pris dans le métro, le train, le travail dans une mairie ou Venise, digressions philosophiques ou références à Spinoza servent en fait de prétexte à des réflexions sur l’art, la politique, le pouvoir, l’amour.

En toile de fond, le théâtre social, celui des lieux, des rencontres et des états d’âme, celui "à la fois dérisoire et émouvant" des hommes et des femmes si vulnérables, toujours en attente de quelque chose, d’amour souvent, d’un destin ou d’une tragédie parfois. Et puis le rêve et le romanesque viennent mêler cet autre rythme, ce temps différent et personnel, au tempo de la société. " Rêve et réalité, voilà deux miroirs qui se regardent et qui engendrent la seule chose qui vaille : le mental ".

Valère Staraselski oscille de l’un à l’autre, évoluant "dans un sur-plein de réel, dans une concrétion extraordinaire de vie", épinglant au passage les iniquités de notre époque. "Il ne se résignait pas à la désaffection des rapports sociaux, ni à la solitude de l’individu moderne, ni au traitement de ses semblables en fonction des profits qu’ils apportent". Il faut peut-être tout le poids de l’écriture pour épaissir le sentiment de réalité, lester le rêve avec des mots. L’amour offre une prise sur le temps. Mais, par l’art, l’homme domine le temps et se dresse contre tous les pouvoirs. Car "il n’est au pouvoir de personne, à moins d’user d’assassinat, de réduire un artiste au silence." Telle est la revanche de Michel-Ange.

Anne-Marie Koenig