Son auteur, Valère Staraselski, essayiste et romancier, propose ici dans une trentaine de textes parus entre 2013 et 2023 à peu près autant de sujets de réflexion avec, pour les lecteurs, le plaisir de découvrir. Il explique, au sens étymologique, il écarte les plis de l’histoire et, entre les plis, apparaît la complexité de l’histoire des idées et de l’histoire tout court.
Trois illustrations parmi d’autres : peu savent sans doute que le dessin animé de Disney, Bambi,qui est pour nous destiné aux enfants, est adapté d’un roman de 1923, de Félix Salten, pseudonyme de Sigmund Salzmann, dans lequel les nazis virent immédiatement une allégorie politique sur le traitement des juifs en Europe ; et ils interdirent l’ouvrage. Les scènes de traque de la mère de Bambi par les chasseurs et l’histoire de Bambi prennent alors une tout autre dimension.
Autre sujet au ton très différent : Le manifeste d’Innsbruck, écrit par l’auteur en 2015 pour répondre à une invitation de l’Institut franco-tyrolien, est construit sur une anaphore « Je ne veux plus » qui passe en revue, avec rage, tout ce qui lui paraît insupportable, hypocrisie et inconsistance des politiques, asservissement au marché, aliénation au capital triomphant, dans le domaine de l’économie comme dans celui de la culture, une société mise à nu et mise à mal.
Enfin, et c’est extrêmement inspirant, le texte d’une intervention de V. Staraselski sur le philosophe italien Domenico Losurdo, qui a réfléchi sur les apports de la révolution bolchevique, et en particulier sur les processus d’émancipation des peuples colonisés, des femmes et de la discrimination censitaire (seuls votaient ceux qui avaient de l’argent). Et selon le philosophe sans le dépassement de ces trois discriminations il n’y a pas de démocratie. Nous la devons donc à la révolution d’Octobre. Sur ce même sujet D. Losurdo rappelle une phrase du conseiller économique de Reagan, Hayek, par ailleurs prix Nobel d’économie : « les droits économiques et sociaux sont l’invention ruineuse de la révolution marxiste » et D. Losurdo de conclure : « Cette critique est l’éloge le plus éloquent que l’on puisse faire de la Révolution d’Octobre ».
Réfléchir sur notre monde, sur le communisme historique et actuel et surtout sur l’action, inséparable pour Valère Staraselski de la théorie, voilà ce à quoi cet ouvrage nécessaire nous convie, avec une critique sans complaisance et un humanisme sans faille.

Gisèle Malaval

La dépêche de l’Aube

*Valère Staraselski, Loin, très loin de Jean-Luc Mélenchon, Préface Arlette Vidal-Naquet.
Ed. L’harmattan